A force de mal dire, le public va forcément mal entendre !
Sur l’utilisation rhétorique des termes « afflux » et « invasion » d’exilés pour justifier la gestion en urgence de leur hébergement en Suisse
Résumé
Le manque de places d’hébergement pour demandeurs d’asile a été une thématique récurrente dans les médias en Suisse en 2014. Pour expliquer cette crise du logement, la « hausse des demandes d’asile » a systématiquement été invoquée par les autorités et répétée en boucle par les médias. L’ouverture d’abris de protection civile, souterrains, est, sauf dans de rares cas, la seule solution envisagée à court terme dans quelques cantons de Suisse romande. Or, malgré la situation géopolitique internationale, en Suisse, ladite hausse n’a pas été si « explosive » ou « extraordinaire », comparée aux années précédentes. Par conséquent, si les cantons peinent à loger les demandeurs d’asile, c’est qu’il y a d’autres raisons, conjoncturelles et structurelles. Je montrerai que le manque de lits est dû au fait que toujours plus de demandeurs d’asile ont le droit de rester et de s’installer en Suisse au regard du droit d’asile. Pourquoi les autorités et les médias ne proposent-ils pas cette grille d’analyse ? Je pose l’hypothèse que la rhétorique de l’invasion, qualifiée de « mythe » par de Haas (de Haas 2008), est intégrée dans un « système de croyances ». Une déformation de la connaissance faisant naître le malentendu (Lazar, 2005), servant à justifier des politiques d’urgence, notamment dans le domaine du logement pour exilés, et empêchant les journalistes d’enquêter sur les vraies raisons du manque de places d’hébergement.
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