Passion, patience et compassion dans La ciudad oscura d’Alfons Cervera

Mots-clés: passion, patience, compassion, époque post-transitionnelle espagnole, Alfons Cervera

Résumé

Dans La ciudad oscura (1987), Alfons Cervera dresse tout au long d’une multitude de récits brefs le portrait d’une Espagne post-transitionnelle désillusionnée. La troisième œuvre fictionnelle de l’écrivain valencien se fait l’expression sentimentale du mal-être sociopolitique de son temps, tant par les thématiques qu’elle aborde dans son ensemble que par la forme fragmentaire de chacune des histoires. Au moyen d’une poétique politico-affective, elle fait correspondre à la déception collective la déréliction individuelle : à travers le prisme de la déliquescence des relations humaines, et en particulier amoureuses, elle met en scène une galerie de personnages dont l’existence est régie par la souffrance, celle-ci se déclinant en trois modalités qui structurent les narrations. La première d’entre elles est la passion au sein des couples, qui devient systématiquement violente et met au jour le fait que l’unité amoureuse n’est qu’un mirage face à l’insurmontable altérité qui mine toute relation. Le pathos enduré par les protagonistes prend également la forme de la patience forcée, dans la mesure où, si les personnages ne se déchirent pas, dans le contexte urbain propice à l’incommunication, ils sont confrontés à une solitude extrême due à leur incapacité à trouver une compagnie satisfaisante en autrui. Leur unique moyen de retrouver une relation d’altérité saine leur est offerte hors de la diégèse par l’instance lectorale, qui compense leur douloureux esseulement par une empathique compréhension de leur situation, qui n’est pas sans rappeler leur propre désenchantement, bien réel cette fois.

Publiée
2021-12-20
Comment citer
GourguesM. « Passion, Patience Et Compassion Dans La Ciudad Oscura d’Alfons Cervera ». Savoirs En Prisme, nᵒ 14, décembre 2021, p. 39-64, doi:10.34929/sep.vi14.231.